Thailande

« L'unité du peuple fait le succès et la prospérité »

Après 1932 : Un Régime militaire

A la suite du coup d’État de 1932, la nouvelle monarchie constitutionnelle va traverser des périodes de crise politique qui vont profiter à l’armée. Dès les premières élections, le parti Khana Ratsadon va se retrouver aux manettes du pouvoir. Composé de membres de l’armée et de civils de la haute-société, le Khana Ratsadon va avoir à sa tête Phraya Manopakorm (un des instigateurs de la Révolution) qui deviendra lors de la première élection organisée en 1932, le tout premier chef du gouvernement de l’histoire du pays. Mais les mesures et les idées assez conservatrices qu’il prône ne vont pas être au goût de certains. En 1933, un coup d’État instigué par les plus jeunes membres du Khana Ratsadon vont destituer le Premier Ministre et mettre à sa place le colonel Phraya Phahon. L’ascension du Khana Ratsadon commece.

Photo de Phraya Phahon

Premier mandat et dictature de Phibun :

Le maréchal Phibun succède à Phraya Phahon au poste de Premier Ministre lors des élections législatives de 1938. Phibun occupe le poste de Premier Ministre et de commandant en chef des armées siamoises. Sous sa houlette, le Siam devient une dictature militaire inspirée du fascisme italien et du totalitarisme. Plusieurs de ses proches obtiennent des positions importantes au sein du gouvernement. La figure de Phibun remplace celle du monarque, un culte de la personnalité se met en place.

Discours de Phibun reprenant le salut fasciste italien

La politique ultranationaliste de Phibun va avoir des conséquences culturelles importante en Thaïlande. Des “mandats culturels” sont mis en places afin de mener à bien ces changements. Une restructuration totale de la culture thaïlandaise s’opère alors. D’une part, le nom du pays change passant du Siam à Thaïlande. Ensuite, d’autres mesures encouragent les Thaïlandais à utiliser le le Thai comme langage au lieu des dialectes régionaux, à connaitre par cœur l’hymne national, à adopter les accoutrements occidentaux, etc. Le but de ces mesures est de changer la vision dont le monde voit le pays. Phibun souhaitait en effet que la Thaïlande apparaisse aux yeux du monde comme un pays développé. Moderniser les coutumes du pays apparaissait donc comme une nécessité.

Affiche montrant aux Thaïlandais comment s’habiller. A gauche, les vêtements interdits ; à droite, les vêtements obligatoires

Des politiques discriminatoires envers les commerces chinois et les populations chinoises sont menées par le gouvernement de Phibun. Le dictateur souhaite que les Thaïlandais achètent des produits Thaï. Toute la politique économique de Phibun est centrée autour du nationalisme et du protectionnisme.

Durant la Seconde Guerre Mondiale, la Thaïlande va user habilement des tensions régionales pour agrandir son territoire. Son alliance avec le Japon va lui permet de conquérir des régions malaises et Indochinoises. En 1942, la Thaïlande s’engage aux côtés de l’Axe dans la guerre. Mais la fin de la guerre sonna aussi la fin du temps de Phibun. En 1945, la Thaïlande paye son alliance avec le Japon et se voit retirer les régions qu’elle avait obtenu. Le mandat de six ans de Phibun toucha à sa fin. L’Assemblée Nationale obtena de Phibun sa démission. Il sera ensuite jugé par un tribunal, à la demande des Alliés, pour crimes de guerre. Cependant, il fut acquitté. Les politiques qu’il a mené ayant eu pour but de protéger les intérêts de la Thaïlande, cela a été la raison pour laquelle il ne fut jamais jugé coupable. Discrédités auprès des puissances alliées à cause de leur collaboration avec les Japonais, les militaires thaïlandais se firent plus discrets pendant quelque temps. Mais ils revinrent en force au gouvernement à compter de 1947-1948, à un moment où leur présence arrangeait les puissances occidentales, inquiètes devant la montée des insurrections communistes parmi les pays voisins.

Photo de Phibun

Second mandat de Phibun :

En 1947, un coup d’État mené par l’armée renverse le gouvernement de Thamrong. Khuan Aphaiwong est placé en tant que nouveau Premier Ministre par les rebelles. Les mauvaises performances du gouvernement de Aphaiwong auront raison de lui. En 1948, il est remplacé par Phibun.

Les politiques anti-communistes et le soutien de Phibun aux États-Unis lors de la guerre de Corée permettent à la Thaïlande de se faire bien voir par les puissances occidentales. Durant ce second mandat, Phibun abandonne le côté fasciste qui a caractérisé son premier mandat. Il opte à l’inverse pour une démocratisation de son pays. Petit à petit, des mécanismes démocratiques se mettent en place. De nouveaux partis politiques se créent, une liberté d’expression se met en place, des réformes sociales sont même mises en œuvre pour les travailleurs.

Photo de Phibun en 1955

Les politiques de Phibun sont toutefois contestées par les opposants royalistes. De nombreuses tentatives de coups d’État voient le jour au cours du mandat de Phibun. La plus connue étant la prise d’otage de Phibun sur le Manhattan par des officiers de la marine royale Thaïlandaise. S’en suivra des violentes manifestations entre la marine et l’armée de terre (soutenant Phibun). Ces derniers finiront par bombarder le navire de guerre où était retenu Phibun, le Sri Ayutthaya, permettant à ce dernier de s’échapper. Cet évènement va permettre à l’armée de renforcer son pouvoir encore plus.

En 1957, les forces armées royalistes emmenées par le maréchal Sarit Thanarat, et appuyé par les États-Unis, font un coup d’État et renversent Phibun. Les royalistes ont raison de Phibun et le pousse à partir en exil au Cambodge puis au Japon.

L’après-Phibun : Un régime militaire entrecoupé de démocratie

Au cours des années 60, la Thaïlande va voir le niveau de sa population s’améliorer. Soutenu par les États-Unis, le régime du nouveau Premier Ministre Sarit Thanarat va consolider cette alliance. De grandes bases aériennes américaines sont établies dans l’est de son territoire, pour servir dans la guerre aérienne contre le Vietnam. L’aide militaire et les investissements américains, tout en contribuant à consolider le pouvoir des militaires et à favoriser une forte croissance économique, firent de la Thaïlande, pourtant le seul pays de la région à ne pas avoir été colonisé, l’un des plus étroitement liés à l’Occident. Le pays servira aussi de terrain de tests à l’armée américaine pour des armes chimiques. De plus en plus de ruraux vont habiter dans les villes, notamment à Bangkok. De même, le nombre d’étudiants dans les universités augmentent et il en va être de même pour l’activisme.

En 1973 et pour la première fois de l’histoire, des manifestations étudiantes contre la junte militaire vont amener avec la bénédiction du roi à une transition démocratique. Les dirigeants militaires sont forcés de partir en exil. Toutefois, le manque de pratique démocratique amène le pays dans une situation chaotique. L’inflation grandissante et la menace communiste venant des pays voisins provoquent une montée du conservatisme. La classe moyenne ayant participé à la révolution tourne le dos aux étudiants. L’armée et les royalistes montent une propagande contre les insurgés. Le 6 octobre 1976 à l’université de Thammasat, l’armée et les groupes paramilitaires massacrent les étudiants protestant contre les violences perpétrées par les premiers. Une purge dans les universités, les médias et les groupes civils se fait. La démocratie imaginée par le mouvement de 1973 est définitivement terminée.

Des étudiants torse nu se couchent, les mains derrière la nuque, sous l’étroite surveillance de la police, lors du massacre de l’université Thammasat, le 6 octobre 1976 à Bangkok. (Photo par – / AFP)

Au cours des années 80, un processus de démocratisation mené par le roi et le Premier Ministre Prem permet à la Thaïlande de voir de moins en moins de violences militaires. Entre quelques coups d’État, la démocratisation du pays s’accompagne de performances économiques fortes. La Thaïlande devient une puissance industrielle de premier plan.

Les années 90 voient les militaires se frictionner entre eux. Les bonnes performances économiques du pays ont bénéficié à une parte de l’armée. En 1991, un coup d’État mené par des généraux de l’Académie Militaire Royale de Chulachomklao renversent le gouvernement de l’époque de Chatichai à cause de la corruption gangrénant le pouvoir. En 1992, le général Suchinda (membre du coup de 91) est élu Premier Ministre. Souhaitant mettre en place un régime militaire, ce dernier va se heurter à la gronde populaire. Des centaines de milliers de manifestants vont se rassembler dans les rues de Bangkok pour protester avec à leur tête, le major-général Chamlong. Les forces armées de Suchinda vont réprimer par la force les manifestations, faisant des centaines de mort. Le roi de peur de voir une guerre civile va convoquer les deux leaders afin qu’ils trouvent une solution pacifique. Cela se résultera par la démission de Suchinda.

Image des manifestations de 1992

Nouvelle constitution :

Devant les scandales de corruption et les violences de 1991, une nouvelle constitution émergea en 1997. Le Parlement passa à 500 membres et deux chambres le constituent : le Sénat et l’Assemblée Nationale. Pour la première fois de l’histoire du pays, les deux chambres sont élus directement par le peuple. Une cour suprême est créée tranchant sur les décisions politiques quelque soit leur nature. L’armée et les forces civiles peuvent s’affronter à armes égales. Cette nouvelle constitution prend aussi en compte les droits humains. La constitution de 1997 garantit les droits politiques fondamentaux comme la liberté d’expression, la liberté religieuse, la pluralité politique, etc.

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